Catégorie : Patrimoine

  • Les Salines Royales de Moûtiers

    Les Salines Royales de Moûtiers

    Quand on parle d’or blanc en montagne, on pense évidemment à la neige, moteur du développement économique de nos vallées alpines. Mais au moyen-âge, l’or blanc c’était le sel.

    Utilisé depuis l’Antiquité pour conserver les aliments, le sel était indispensable non seulement à l’alimentation des hommes, mais aussi à celle du bétail puisqu’il favorise la lactation.
    Il est aussi utilisé traditionnellement dans la production et la fabrication des fromages au moment de l’égouttage et lors de l’affinage.

    Origines et développement historique

    Le sel était récolté principalement au bord de mer, mais en montagne on produisait le sel par extraction minière ou par évaporation d’eau de sources.
    C’est précisément grâce à l’exploitation d’une source d’eau salée située à Salins-Fontaine, à 2 kilomètres de Moûtiers, que les Salines ont vu le jour, probablement dès le 15ème siècle.

    C’est le duc Emmanuel-Philibert de Savoie qui va dynamiser la production à la fin du 16ème siècle. Les salines deviennent « Salines Royales en 1720 sous la Maison de Savoie, alors à la tête du Royaume de Sardaigne et la production annuelle atteindra 1000 tonnes !

    Une innovation écologique avant l’heure

    Le sel était récupéré par évaporation grâce à une trentaine de chaudières à bois qui chauffaient l’eau salée.
    Afin d’économiser le bois et de rationaliser la production, un système de cristallisation ingénieux fût mis en place par l’ingénieur de Buttet au 18ème siècle : l’eau salée ruisselait lentement sur des cordages ou des fagots d’épines suspendus à des piliers, permettant au sel de cristalliser sous l’effet du vent et du soleil.

    Une source de revenus essentielle pour la Maison de Savoie

    À partir Moyen Âge, le commerce du sel devint une activité majeure. Les routes du sel comme celle de la Vanoise sillonnaient l’Europe et l’Asie, transportant cet « or blanc » des zones de production jusqu’aux marchés éloignés.
    La mise en place de la gabelle du sel en Savoie fût une source de revenu essentielle à la maison de Savoie. La levée ce cet impôt fût optimisée grâce à un recensement exhaustif des foyers savoyards dès 1561.

    Mais en 1860 avec l’annexion de la Savoie par la France et l’ouverture à la concurrence les Salines Royales cessèrent leur activité. Il reste 4 de ces piliers qui trônent encore dans la zone commerciale des Salines ( voir photo), vestiges d’un passé industriel et économique de la région souvent méconnu.

    Sources consultées

    Les Salines Royales de Moûtiers – Coeur de Tarentaise Tourisme
    Moûtiers – Wikipédia
    Le Dauphiné Libéré – Panneau informatif sur les Salines Royales
    La fiscalité du sel en Savoie (Revue d’Histoire Savoyarde, archives régionales)
    Gabelle et fiscalité du sel dans les États de Savoie (Cairn.info)

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  • Le vieil Annecy

    Le vieil Annecy

    Le vieil Annecy est le quartier historique de la ville. Il ne faut pas le confondre avec Annecy-le-Vieux qui est une commune adjacente beaucoup moins touristique.

    Voici quelques pistes pour découvrir la vieille ville et son histoire, tout en vous baladant le long des canaux et des ponts de notre Venise des Alpes.

    Quand visiter le vieil Annecy ?

    Je vous recommande de venir si possible hors saison, en mai et juin ou à l’automne car l’accès à la vieille ville est souvent bien périlleux en juillet août, du fait de la surfréquentation du site. Je ne vous cache pas que depuis une dizaine d’années je passe mes week-ends d’été en montagne pour faire de la rando dans nos Savoie, loin de l’agitation des bords du lac.

    Suivez le parcours que j’ai fait pour se balader dans la vieille ville afin de ne rater aucun lieu touristique.

    Les incontournables de la vieille ville :

    L’Hôtel de Ville

    Malheureusement victime d’un incendie en 2019 et toujours pas complétement restauré en ce mois de mai 2023, vous pourrez admirer tout de même ses façades de style néoclassique qui caractérise l’architecture sarde du 19ème siècle. En effet la ville d’Annecy faisait à cette époque partie du Royaume de Sardaigne, l’annexion de la Savoie à la France datant seulement de 1861. Si par ailleurs, vous passez par Chambéry, vous pourrez admirer le palais de justice de la ville qui, avec la même inspiration architecturale ressemble comme deux gouttes d’eau à l’Hôtel de ville d’Annecy.

    Adresse : 1 esplanade de l’hôtel-de-ville 74000 Annecy

    Le Palais de l’Isle

    Ancienne maison forte du XIIème siècle bâtie sur une île rocheuse, il est le bâtiment le plus photographié d’Annecy. Il fût tour à tour prison du châtelain d’Annecy, atelier monétaire, tribunal puis à nouveau prison. Il est depuis 1900 classé monument historique

    Infos pratiques :

    Adresse : 3 passage de l’ïle 74000 Annecy

    Téléphone : 04.85.46.76.80

    Horaires d’ouverture :

    Horaires d’hiver (1er octobre – 31 mai)

    10h-12h et 14h-17h

    Horaires d’été (1er juin – 30 septembre)

    10h30-18h
    Fermé le mardi toute l’année.
    Fermeture le 1er janvier, lundi de Pâques, 1er et 8 mai, Ascension, 1er et 11 novembre, 24 et 25 décembre.

    Tarifs :

    Adulte : 3,90 €
    Enfant : 2 €.
    Gratuit pour les moins de 12 ans.
    Tarif groupe à partir de 5 personnes.

    Le Château d’Annecy et son musée

    Ancien château fort construit dès le XIIème siècle, le Château d’Annecy fût la résidence des comtes de Genève aux 13ème et 14ème puis des ducs de Savoie-Nemours. Servant de caserne à la Révolution française puis pendant les deux guerres mondiales, il est aujourd’hui propriété de la ville d’Annecy et héberge un musée qui présente des expositions temporaires ainsi qu’un observatoire des lacs alpins.

    Infos pratiques :

    Adresse : 1 place du Château  74000 Annecy

    Téléphone : 04.85.46.76.70

    Horaires d’ouverture :

    Horaires d’hiver (1er octobre – 31 mai)

    10h-12h et 14h-17h

    Horaires d’été (1er juin – 30 septembre)

    10h30-18h

    Fermeture le 1er janvier, lundi de Pâques, 1er et 8 mai, Ascension, 1er et 11 novembre, 24 et 25 décembre.
    L’accès est libre et gratuit chaque premier dimanche du mois pour tous, d’octobre à mai.

    Tarifs :

    Plein tarif : 5,60 €
    Tarif réduit : 3 €.
    Gratuit pour les moins de 12 ans, la presse, les détenteurs de la carte Pass’Région, les enfants accompagnés d’un adulte, les enseignants.

    Les rues Sainte-Claire et Perrière

    Vous ne pouvez pas les rater : la rue Sainte- Claire et la rue Perrière avec leurs arcades du 16ème siècle constituent l’artère principale de la vieille ville. Elles sont délimitées à leur extrémité par des portes fortifiées qui sont des vestiges de l’ancien mur d’enceinte de la ville.

    Se promener le long du Thiou

    Au gré de votre promenade vous traverserez plusieurs fois les canaux du Thiou, rivière autour de laquelle s’est construit le centre historique d’Annecy. Afin de réguler son débit pour les industries locales qui le bordaient, un système de vannes fût mis en place au 19ème siècle par l’ingénieur Sadi Carnot. Elles permettent également aujourd’hui de réguler le niveau du lac d’Annecy.

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  • Balade dans la vieille ville d’Annecy

    Balade dans la vieille ville d’Annecy

    Partez à la découverte d’Annecy côté lac et côté vieille ville, grâce à cette randonnée urbaine qui vous emmènera du lac au château en déambulant le long des canaux et des ruelles médiévales. Une balade tout en couleurs.

    Annecy est une ville qui se visite à pied. Si vous venez en voiture, le problème numéro un est de trouver une place pour se garer . La ville d’Annecy a réduit comme peau de chagrin le nombre de places gratuites surtout en période estivale et les parkings payants du centre ville sont pris d’assaut. Trouver une place est un vrai parcours du combattant .

    Où se garer gratuitement à Annecy ?

    Si vous venez avant le 1er juillet et après le 31 août, voici une liste de parking gratuits qui restent assez proches des lieux touristiques (15 à 20 minutes de marche pour certains).

    Bon plan :

    Si vous visitez Annecy entre le 1er juillet et le 31 août, je vous conseille d’utiliser les transports en commun pour vous rendre dans le centre ville d’Annecy. Vous pouvez vous garer sur les parkings de proximité gratuits. Ils sont loin du centre-ville mais proches des arrêts de bus. (lien vers les transports urbains de l’agglomération annécienne).

    Privilégier la visite de la vieille ville le matin les jours de marché, (le mardi, le vendredi et le dimanche), c’est l’occasion de rencontrer des producteurs locaux tout en déambulant dans les ruelles colorées à la découverte du Château, du palais de l’Île, de la porte Sainte-Claire…

    Mon parcours

    Le parcours serpente autour des lieux emblématiques d’Annecy, mais vous pouvez le quitter le temps d’un détour et le retrouver plus tard. Il fait 5.55 km  pour une durée de 1h 30 à 2h 30 en fonction des pauses photos ou des pauses café !!

    Télécharger le fichier PDF de la balade avec la carte et les descriptions détaillées :

    Télécharger ici

    Envie d’une pause café ?

    Il y a 3 endroits que j’affectionne particulièrement pour boire un verre :

    La Buvette du Marché :

    J’aime y aller tôt le matin les jours de marché. Les annéciens matinaux croisent les marchands de fruits et légumes dans une ambiance bon enfant. La terrasse est également très prisée en journée.

    20 Rue Sainte-Claire, 74000 Annecy – voir sur la carte 

    Le café des Arts

    Souvent cité dans les guides et pour cause : il est niché juste derrière le Palais de l’Île à deux pas du Thiou, le canal qui traverse la vieille ville. La terrasse, grande et calme est une invitation aux discussions entre amis, autour d’un verre. Des groupes de musique locaux animent souvent les soirées estivales. BD et livres à l’intérieur.

    4 passage de l’île, 74000 Annecy –  voir sur la carte 

    Aux Cygnes Gourmands

    N’hésitez pas à faire un détour pour y prendre votre petit déjeuner et goûter aux meilleures viennoiseries d’Annecy ! Le croissant est tout simplement divin ! Tout est fait maison : chocolats, pâtisseries … Clientèle d’habitués. Idéal pour faire une pause pendant votre balade dans la vieille ville.

    11 rue Grenette, 74000 Annecy – voir sur la carte 

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  • La réserve naturelle du bout du lac d’Annecy

    La réserve naturelle du bout du lac d’Annecy

    La réserve naturelle du Bout du Lac d’Annecy est une zone marécageuse située sur la commune de Doussard, qui abrite une grande diversité d’espèces animales et végétales, dont le Castor d’Europe. Un parcours balisé et pédagogique traverse une prairie humide et une forêt alluviale jusqu’à une grande roselière qui offre un point de vue exceptionnel sur le lac. Une balade de 3,7 km très facile à faire en famille.

    L’Ire et l’Eau Morte les deux rivières qui dessinent la réserve naturelle

    Ces rivières sauvages prennent toutes les deux leur source dans le massif des Bauges. Elles sont sujettes à d’importantes crues à l’occasion de grandes pluies et à la fonte des neiges. Elles déposent des sédiments et enrichissent ainsi le milieu naturel. Elles sont d’ailleurs les principales sources d’alimentation du lac d’Annecy.
    Chose exceptionnelle pour un lac alpin, l’Ire forme un Delta qui est le refuge d’une faune et d’une flore remarquable.
    Le tracé de l’Eau Morte est naturel, il se redessine à chaque crue en formant des méandres, des bancs de graviers et des accumulations de bois morts appelées embâcles

    Forêts et prairies humides

    De nombreuses espèces poussent dans cette dernière zone humide du lac d’Annecy. On trouve des orchidées, mais aussi Reine des prés, qui contient de l’acide acétylsalicylique à l’origine de l’aspirine, de la Saule, des taillis d’aulnes, des bois de chênes pédonculés et bien sur le Roseau.

    Le Castor d’Europe

    Réintroduit dans la réserve en 1972, ce gros rongeur qui peut peser jusqu’à 30 kg vit sur le lac et les rivières. Mais il est difficile de l’apercevoir le jour car il sort essentiellement la nuit pour se nourrir de racines et d’écorces. Son habitat et constitué d’un terrier doublé d’un barrage constitué de branchages qui lui permet de maintenir un niveau d’eau suffisant pour se protéger des prédateurs.

    La roselière un espace exceptionnel protégé

    Fortement menacées par l’activité humaine (aménagement des berges) la superficie des roselières des grands lac alpins a diminué de 90 % depuis le début du 20 -ème siècle. Raison de plus pour protéger ce lieu unique des bords du lac d’Annecy.
    De nombreux oiseaux vivent dans cette roselière : Le Bruant des roseaux, la Rousserole verderolle, la Rousserole effarvatte ou encore le Bruant des roseaux.

    Le savez-vous :

    Les roseaux sont capables de filtrer les polluants apportés par les rivières. Grâce à leurs racines ils contiennent l’érosion des berges du lac et jouent le rôle d’éponge lors de fortes précipitations en retenant puis restituant l’eau progressivement en période plus sèche.

    La tour médiévale de Beauvivier

    La tour de Beauvivier aurait été construite en 1305. Elle servait de point de contrôle des marchandises qui étaient transportées sur le lac. Les bateaux devaient s’acquitter d’une taxe avant de décharger leur marchandise. Consolidée en 1993, elle est haute aujourd’hui haute d’une dizaine de mètres. Un escalier métallique permet d’accéder à son sommet qui offre un point de vue exceptionnel sur le lac et la roselière.

    Informations pratiques

    Ouverture : toute l’année hors période d’enneigement

    Longeur du parcours :  3,7 km aller-retour

    Adresse : Bout du Lac – Route de la vieille Eglise – 74210 Doussard

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  • Les Allobroges

    Les Allobroges

    Les Allobroges ou « le chant des Allobroges » est l’hymne de la Savoie. L’auteur de cette mélodie très populaire serait Giuseppe CONTERNO, chef de Musique dans l’armée de Piémont-Sardaigne qui modifia un air déjà connu à son retour de Crimée en 1856.

    Les paroles furent écrites la même année par Joseph DESSAIX né à Allinges en 1817 historien remarqué et journaliste.

    Un hymne à la liberté

    Intitulé à l’origine par son auteur « La Liberté », ce chant évoque une terre de Savoie accueillante pour tous les opprimés des peuples d’Europe dont les révolutions de 1848 furent écrasées dans le sang.
    Il salue tout particulièrement le statut de la monarchie constitutionnelle de Savoie accordé par le roi Charles-Albert le 4 mars 1848, ainsi que le courage de ses habitants dont les ancêtres les Allobroges étaient un peuple gaulois installé sur les terres de Savoie dès le IIIème siècle avant J.C.

    Un chant enthousiaste et populaire

    L’actrice parisienne Clarisse Miroy reprend pour la 1ère fois ce chant lors d’une représentation théâtrale à Chambéry l le 11 mai 1856. L’hymne se répand alors à travers tout le duché de Savoie.
    Joué et chanté lors de cérémonies officielles, le chant des Allobroges fait partie du patrimoine culturel local. Il fût même utilisé comme chant de ralliement en introduction de chaque match de l’ancienne équipe de football de ligue 1 de l’ETG. (Evian – Thonon – Gaillard)

    Les Paroles de la version originale :

    1er couplet :

    Je te salue, ô terre hospitalière,
    Où le malheur trouva protection ;
    D’un peuple libre arborant la bannière,
    Je viens fêter la Constitution.
    Proscrite, hélas ! j’ai dû quitter la France,
    Pour m’abriter sous un climat plus doux;
    Mais au foyer j’ai laissé l’espérance,
    En attendant, en attendant, je m’arrête chez vous.

    Refrain :

    Allobroges vaillants ! Dans vos vertes campagnes,

    Accordez-moi toujours asile et sûreté,

    Car j’aime à respirer l’air pur de vos montagnes,

    2e couplet :

    Je suis la Liberté ! La Liberté !

    Au cri d’appel des peuples en alarme,
    J’ai répondu par un cri de réveil ;
    Sourds à ma voix, ces esclaves sans armes
    Restèrent tous dans un profond sommeil.
    Relève-toi, ma Pologne héroïque !
    Car pour t’aider je m’avance à grands pas ;
    Secoue enfin ton sommeil léthargique,
    Et je le veux, et je le veux, tu ne périras pas !

    3e couplet :

    Un mot d’espoir à la belle Italie :
    Courage à vous, Lombards, je reviendrai !
    Un mot d’amour au peuple de Hongrie !
    Forte avec tous, et je triompherai.
    En attendant le jour de délivrance,
    Priant les Dieux d’apaiser leur courroux,
    Pour faire luire un rayon d’espérance
    Bons Savoisiens, Bons Savoisiens, Je m’arrête chez vous !

    Les Paroles de la version chantée par les chasseurs alpins, interprétée magnifiquement pendants le confinement de 2020 :

    Je te salue ô terre hospitalière
    Où le malheur trouva protection
    D’un peuple libre arborant la bannière
    Je viens fêter la constitution.
    Je t’ai quitté berceau de mon enfance
    Pour m’abriter sous un climat plus doux.
    Mais au foyer j’ai laissé l’espérance
    En attendant je m’arrête chez vous.

    Refrain

    Allobroges vaillants,
    Dans vos vertes campagnes
    Accordez-moi toujours asile et sûreté
    Car j’aime à respirer l’air pur
    De vos montagnes
    Je suis la liberté, la liberté

    II

    Au cri d’appel des peuples en alarme
    J’ai répondu par un cri de réveil
    Sourds à ma voix, ces esclaves sans armes
    Restèrent tous dans un profond sommeil.
    Relève-toi, ô ma France héroïque
    Car pour t’aider je m’avance à grand pas.
    Secoue enfin ton sommeil léthargique
    Et, soit en sûr, tu ne périras pas.

    III

    Un mot d’espoir à la belle Italie.
    Courage à vous Lombards ! Je reviendrai.
    Que chaque peuple à mon cri se rallie
    Forte avec tous et je triompherai.
    En attendant le jour de délivrance.
    Priant les dieux d’écarter leur courroux
    Pour faire luire un rayon d’espérance
    Bons Savoisiens, je resterai chez vous

    Vidéo des amicales des fanfares des trois bataillons :

    Pour en savoir plus :

    Résumé historique au gîte savoisien :

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  • Les cristaux du Mont-Blanc : une fascination qui perdure dans le temps

    Les cristaux du Mont-Blanc : une fascination qui perdure dans le temps

    Connus depuis la Préhistoire, les cristaux de quartz ont traversé les siècles en fascinant les hommes de toutes conditions. Ceux du Mont-Blanc sont réputés dans le monde entier.

    De formes, de tailles, de couleurs différentes, ils se cachent au fond de cavités enchâssées dans le granite et font rêver des hommes qui, inlassablement, partent à leur recherche : les cristalliers.

    Les cristaux de quartz au fil du temps

    Leur pureté, leur transparence, leur forme géométrique, inhabituelles dans le monde minéral, ont depuis des millénaires engendré un émerveillement quasi mystique.

    Ses premières traces au cours de la préhistoire

    Des pointes de flèches, des silex datant du paléolithique ont été retrouvés taillés dans le cristal de roche, le plus dur de tous les quartz. Sans doute pour une utilisation rituelle.
    La découverte en Savoie et dans le Valais, d’objets et outils taillés dans ce même cristal atteste de leur utilisation au cours du mésolithique.

    L’Antiquité lui offre ses lettres de noblesse

    Dès l’Antiquité, le cristal de roche désigne la variété de quartz incolore et transparent provenant des montagnes : il était alors considéré comme de la glace qui ne fondait jamais.
    Au cours de la Haute Antiquité, il fait partie des pierres précieuses et est utilisé pour la fabrication de parures et d’objets d’art.

    Du Moyen-Âge à la Renaissance

    Au Moyen-Âge il sert à la confection de reliquaires précieux et à la Renaissance, dans les cours royales d’Allemagne, de France et d’Italie, les objets en cristal de roche sont des chefs-d’œuvres très prisés, déclinés sous forme de coupes, vases ou hanaps.

    Les vrais débuts au cours du 17ème siècle

    Au 17ème siècle on retrouve dans une lettre, une première description de l’activité des cristalliers au cœur de la vallée de Chamonix. Elle parle « d’une glace que l’on peut appeler perpétuelle…Les feux de cinq à six mille canicules, ny les eaux du Déluge universel n’ont pas eu la force de le fondre, si ce n’est en quelques endroits, où l’on trouve souvent du cristal et des pierres précieux. Mais pour dire vray, il est dangereux de les y chercher. Les curieux et les avares y sont souvent accablez en Esté sous la ruine des neiges qui s’éboulent. » C’est aussi à cette époque que l’on découvre un texte relatant les premières techniques de prospection et d’extraction par l’usage des explosifs. Le démarrage en grand de l’activité des cristalliers se développe réellement à partir des années 1650.

    La frénésie du 18ème siècle

    Au 18ème siècle la recherche des cristaux bat son plein. C’est une activité d’opportunité, quasi mythique qui va enrôler toute une population désireuse de profiter de cette manne providentielle. Les hommes laissent aux femmes le travail des champs, emmenant avec eux les enfants dans cette chasse au trésor. Les chasseurs traquent le chamois et les cristaux. Ils vendent aux touristes anglais leurs plus belles pièces, en privant ainsi le royaume Sarde qui les réclame pour en faire des lustres et des chandeliers.

    L’intérêt s’amoindrit au 19ème siècle

    Au début du 19ème les cabinets de curiosités sont à la mode, les « savants » expliquent et les grands se passionnent pour le naturalisme : le roi de France va recevoir des mains d’un des premiers guides Michel Paccard , ses plus beaux cristaux et un bouquetin vivant ! Ce commerce naturaliste renforce encore la fouille des moraines du Mont-Blanc. Les guides naturalistes cristalliers, les pauvres, les paysans, tous s’aventurent dans le massif en bravant tous les dangers de la montagne.
    Vers 1850, l’intérêt pour les choses naturalistes disparaît progressivement. En 1900, l’activité des cristalliers est devenue quasi inexistante.

    Le 20ème siècle : le rebond

    La première guerre mondiale met un terme aux collections des minéraux. Mais dans les années 60, les collectionneurs américains se passionnent à nouveau pour les cristaux du Mont-Blanc et relancent ainsi l’activité des cristalliers.

    Le 21ème siècle et ses dérives

    Aujourd’hui ils sont environ une soixantaine déclarés auprès de la mairie à parcourir le massif. Le réchauffement climatique, en faisant reculer les glaciers offre de nouvelles aires de prospection.  Les prix à la hausse de ces joyaux montagnards font naître de nouvelles vocations. Des alpinistes, avec de nouvelles techniques de grimpe acrobatique mais purement attirés par l’appât du gain tentent leur chance. Et abandonnent souvent rapidement …

    Comment naît un cristal de quartz ?

    Le mot quartz provient sans doute d’un mot en vieil allemand « quaderz » qui signifie « mauvais minerai ».

    Un schéma qui représente un four à cristaux
    Coupe type d’un four à cristaux – d’après Bull. Club Minéralogie de Chamonix. 1970. Remanié

    Un phénomène géologique datant de 18 à 20 millions d’années

    Les cristaux de quartz sont composés de silice, (formule chimique SiO2) l’élément minéral le plus représenté sur terre. Les mouvements tectoniques à l’origine de la chaîne alpine ont généré des tensions dans les roches qui se sont fissurées par endroits. Ces fentes et fractures sont datées de 18 à 20 Ma. Le granite est altéré et poreux. Les circulations hydrothermales qui y siègent vont dissoudre la silice de la roche. Dans des conditions de température (entre 573 et 1470 °C) et de pression adéquates, cet élément en saturation va cristalliser et former des quartz. L’ensemble de la fente ou de la géode que l’on appelle un four va alors se tapisser de cristaux.

    Les différents types de cristaux dans le Mont-Blanc

    Les fentes alpines et fours de ce massif granitique fournissent de très beaux spécimen principalement de quartz fumés et de fluorites rose.
    Les quartz sont des cristaux trapus et très purs. Ils peuvent prendre toutes les teintes allant de la transparence absolue (quartz hyalin ou cristal de roche) jusqu’au noir profond (quartz morion). Entre les deux on trouve tous les quartz fumés. Leur teinte, qui varie du brun au noir, est due à l’irradiation naturelle du granite environnant sur leurs impuretés d’aluminium.
    Les cristaux de fluorite, très rares, sont de forme octaédrique et de couleur rose à rouge.
    Une large variété de formes et de tailles existe. Classiquement c’est un prisme hexagonal, plus ou moins large, plus ou moins long, terminé en pointe. Mais on trouve dans le massif le très rare quartz vrillé dit gwindel qui est plat avec un axe en hélice.
    Les cristaux sont parfois assemblés en groupe : on parle de macle. Leur orientation les uns par rapport aux autres est régie par des lois définies complexes et propres à chaque gisement.

    Les cristalliers du Mont-Blanc de nos jours

    A la fin des années 60, l’activité de collecte de cristaux du Mont-Blanc est relancée pour répondre à la demande pressante des collectionneurs américains. Ce sont les guides de haute montagne qui les premiers se remettent à explorer les fissures du massif.

    le massif du Mont-Blanc
    Le massif du Mont-Blanc regorge encore de trésors cachés

    Qui sont ces aventuriers d’aujourd’hui ?

    Jeunes et moins jeunes, descendants de longues lignées de cristalliers ou néophytes passionnés, ils ont tous en commun l’amour de la montagne et les capacités techniques pour escalader les parois rocheuses à la recherche des fours à cristaux.
    De cette passion qui les anime, aucun d’entre eux n’en vit réellement.
    Pour beaucoup, cristalliers depuis de très longues années, déjà enfant trottant derrière leurs pères, c’est une espèce de chasse au trésor qu’ils poursuivent inlassablement. Construite comme une véritable enquête. Du repérage aux jumelles de signes indiquant la présence d’un four dans les parois, aux escalades de plus en plus acrobatiques et engagées pour explorer des endroits vierges de toute recherche. La fonte du permafrost et le recul des glaciers qui dévoilent de nouvelles zones à fouiller, attirent chaque saison de nouveaux prospecteurs. Mais le réchauffement climatique favorise chutes de pierres et éboulements et les accidents mortels ne sont pas rares. C’est une passion d’engagement sur le long terme qui chaque année laisse sur le bord de la route les moins motivés et les moins chanceux.

    Une exploration encadrée

    Ils sont une soixantaine à s’être déclarés auprès de la mairie. Obligation qui leur confère le droit d’aller fouiller les roches du Mont-Blanc dont le sol et sous-sol appartiennent à la commune de Chamonix.
    Depuis 1996, pour protéger et préserver cet environnement montagnard, une circulaire ministérielle a interdit l’utilisation des explosifs pour sortir les cristaux de leur gangue de pierre. Seuls outils autorisés : le burin et la masse…
    De son côté, en 2008, la mairie de Chamonix a pris un arrêté établissant un code d’honneur des cristalliers : en fin de saison de prospection, le 15 décembre, ces derniers doivent présenter les cristaux qu’ils ont extraits et lui donner la priorité en cas de vente pour éviter leur départ dans des collections privées et conserver ainsi ce patrimoine.

    L’explosion des prix

    Certains minéraux d’exception, comme les fluorines et les quartz gwindel , très rares voient leurs prix s’envoler. Un marché parallèle, destiné aux collectionneurs et non déclaré semble exister. La quête du joyau d’exception est dans tous les esprits et fait naître des envies auprès des nouveaux chercheurs s’improvisant cristalliers. Mais il ne suffit pas d’être bon alpiniste et la méconnaissance du massif, son immensité et ses difficultés font que ces derniers abandonnent rapidement.
    Il ne restera au final que les véritables passionnés …

    Bibliographie : Une courte histoire des cristalliers du Massif par Eric Asselborn.

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    Quand la nature sculpte les lapiaz

    Les arbres têtards

  • Quand la nature sculpte les lapiaz

    Quand la nature sculpte les lapiaz

    Tous les jours nous pouvons contempler le travail que l’érosion effectue depuis des millions d’années sur les roches terrestres. Sommets déchiquetés ou arrondis, falaises, cols, canyons sont les résultats les plus évidents de son action.

    Les lapiaz, sont le fruit de cette usure que le temps imprime en surface des plateaux de roches calcaires. Le spectacle qui en résulte est souvent qualifié d’extraordinaire tant il est unique en son genre.

    Le refuge de Platé en Haute-Savoie
    Le refuge de Platé en Haute-Savoie

    Où trouve-t-on des lapiaz en Haute Savoie ?

    Le plus connu est le désert de Platé. Il s’étire sur 2000 hectares en face du Mont Blanc à 2500m d’altitude. C’est un grand plateau calcaire à peine parsemé de végétation qui justifie son nom de “désert”. La fonte des glaciers qui le recouvraient  a commencé un remodelage  que les eaux de ruissellement poursuivent entraînant sa lente et inéluctable transformation. Alternance de diaclases (fissures qui s’élargissent en s’érodant et non en s’écartant) plus ou moins profondes, d’arêtes aiguisées et coupantes, de vagues et de rigoles, de saignées, de marmites, de murailles, il constitue le plus grand lapiaz d’Europe.

    Très différent, le plateau du Parmelan, ceinturé par ses falaises imposantes révèle à sa surface ses lapiaz disséminés au milieu de ses mélèzes et pâturages. D’imposants gouffres, failles et avens balafrent ce paysage où le vert alterne avec les pierres de calcaire blanchi.

    Le plateau du Parmelan en Haute-Savoie
    Les Lapiaz du Parmelan en Haute-Savoie

    Mais comment se forment ces lapiaz ?

    Les calcaires sont des roches sédimentaires, facilement solubles dans l’eau et composées majoritairement de carbonate de calcium CaCO3 mais aussi de carbonate de magnésium MgCO3. Ils se sont formés durant des millions d’années, par accumulation de coquillages et autres squelettes marins au fond des mers ou étendues lacustres. Les mouvements tectoniques en ont propulsé un peu partout à la surface de notre globe.

    Le karst est une structure géomorphologique qui résulte de l’érosion de ces roches solubles, essentiellement des calcaires. Il présente souvent un paysage tourmenté et un sous-sol riche de cavités: gouffres, rivières souterraines, grottes.

    Les lapiaz du désert de Platé
    Le travail de l’érosion: les rigoles de dissolution

    Sa morphologie superficielle la plus spectaculaire s’appelle un lapiaz ( aussi appelé lapiès, lapiez, lapiès ou karren). Il s’agit d’une surface parcourue de “rigoles de dissolution” plus ou moins marquées, certaines apparues à partir des diaclases qui s’élargissent progressivement sous l’action des eaux de ruissellement. Cette dissolution du calcaire exige la présence de CO2 au sein de cette eau. Ce CO2 provient en partie de l’atmosphère mais aussi de la respiration des êtres vivants, bactéries, champignons et racines de végétaux qui tapissent les fissures et anfractuosités de la roche. En surface d’un sol riche en humus, les effets de la dissolution seront plus importants et plus rapides, donnant naissance à des failles parfois suffisamment profondes (aven) pour communiquer avec un réseau de galeries souterraines.

    Une simple micro-dépression de la roche peut s’approfondir sous l’effet de la dissolution et se transformer en cupule puis se creuser encore et encore au fil des millénaires….
    De ce long travail d’érosion, il en résulte un assemblage de roches calcaires blanchies d’une douceur sensuelle, aux formes parfois arrondies entre des arêtes vives, de trous béants, failles ou avens, d’arches et de murailles. Tout un maelstrom de formes qui donne un sentiment d’irréelle beauté à ces paysages.

    Les lapiaz des Dents de Lanfon
    Les lapiaz des Dents de Lanfon


    Mes plus belles randonnées

  • L’histoire des clochers à bulbe de Haute-Savoie

    L’histoire des clochers à bulbe de Haute-Savoie

    Mais comment une influence orientale a-t-elle pu inspirer nos bâtisseurs de clochers ?

    Depuis longtemps intégrés au patrimoine savoyard, ils promènent leur architecture baroque sur fond de montagnes et de glaciers depuis la vallée de Chamonix jusque dans les vallées du Chablais, du Beaufortain et du Faucigny.

    Une inspiration orientale

    Ces clochers à bulbe ou oignon sont d’origine byzantine. Mais les pays froids les ont rapidement adoptés car la neige glisse sur leurs formes douces et arrondies.
    On les retrouve dans le Saint Empire germanique, particulièrement en Bavière, en Forêt Noire, en Autriche et dans les pays slaves.
    Ces pays ont accueilli certains de nos migrants partis chercher du travail loin des conditions frustres des montagnes. Ce sont eux, qui lors de leur retour sur leurs terres ont importé les images étonnantes de ces édifices alémaniques et participé financièrement à leur réalisation.

    Comment les catholiques s’en sont emparé

    La construction de nouveaux édifices religieux en ce début du 19ème siècle répond à la bonne vitalité de la religion catholique. Il s’agit donc de construire de nouveaux édifices pour accueillir une population en forte expansion démographique, de marquer les esprits par la magnificence et aussi de faire mieux que les communes voisines. Le clocher à bulbe, d’une réalisation coûteuse que seules les communes montagnardes possédant alpages et bois communaux peuvent s’offrir, répond parfaitement à ces objectifs. L’architecture baroque est à la mode, le catholicisme assoit son pouvoir en installant des églises qui recèlent des merveilles dans chacune de ses paroisses. A l’extérieur, des clochers étonnants de courbes en métal poli qui s’opposent au côté brut des roches et des terres savoyardes. A l’intérieur d’autres trésors: retables, fresques, chaires, statuettes de bois polychrome…

    De 1802 à 1887: le temps des constructions

    Même si un plan de l’église de Menthon datant de 1779 révèle le tracé d’une esquisse d’ une flèche et d’un bulbe, le temps des clochers à bulbe commence vraiment en 1802 avec la construction de l’église de Montriond. S’en suivent celles de Morzine en 1803, de Chamonix en 1807, d’Abondance en 1811 et de Saint Gervais en 1819. A partir de 1820 les édifications s’accélèrent: 1821 la Clusaz, 1823 Saint Sigismond, 1824 Mont Saxonnex, 1825 les Houches et Hauteluce, 1826 Sixt et Bellevaux, 1827 Thônes, 1830 Ballaison, 1841 Marignier, 17856 Yvoire, 1875 Sciez et le Grand Bornand. Le clocher d’Onnion, érigé en 1887 sera le dernier !

    Un peu d’architecture

    Le principe: partir de la tour carrée du clocher pour arriver à une structure ronde en forme de bulbe, le tout agrémenté de multiples variations esthétiques. Ce sont ces superpositions qui donnent à ces clochers leur silhouette étonnante!
    La tour du clocher, de section carrée, supporte une toiture à 4 pans.
    On passe ensuite à une forme de section octogonale, un boudin ou tore, qui permet la transition vers la forme ronde.
    Le lanternon est la construction suivante à 8 pans, parfois ajourée pour assurer l’éclairage. Il est surmonté d’un toit également à 8 pans.
    Enfin le bulbe. Surmonté de sa flèche très fine et de forme octogonale.
    A sa pointe, une boule qui représente le monde, sur laquelle est plantée la croix, surmontée en finale du coq, emblème du Christ!
    Au 18ème et 19ème siècle, le bois sous forme d’ancelles, le fer étamé puis le cuivre furent utilisés comme revêtement. Assez peu résistants à l’humidité ou à la corrosion, ils furent régulièrement remplacés par d’autres matériaux. Les réfections récentes utilisent de l’acier inoxydable parfois traité pour obtenir une teinte patinée.
    Mais en l’an 2000, Chamonix a choisi de restaurer son clocher à bulbe en utilisant le titane comme matériau de recouvrement, le propulsant ainsi brillamment au 21ème siècle!

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    Le chant des Allobroges

    Les cristaux du Mont-Blanc

  • Les arbres têtards, seigneurs de nos campagnes

    Les arbres têtards, seigneurs de nos campagnes

    Arbres extraordinaires avec leurs étranges gueules cassées, majestueusement présents dans toutes nos campagnes et pourtant inconnus…. leurs mille visages nous interpellent puis nous fascinent. Leur vie a côtoyé celles de nos ancêtres paysans depuis des siècles. Oubliés, délaissés, coupés, ces survivants ont ressurgi comme l’ emblème patrimonial de l’année 2020: l’année des arbres à trognes.

    Les arbres têtards

    Son origine

    Un vieux tronc, noueux, cabossé, tordu, renflé en son sommet lui donnant ainsi une vague allure de larve de batracien …. de nombreuses branches fines qui s’étirent en halo autour de sa tête ligneuse, voici l’arbre têtard.
    Incontournable dans nos campagnes depuis le Moyen Âge, il a atteint son apogée aux 19ème et 20ème siècle mais son plus ancien vestige de chêne, a été daté de plus de 3000 ans!
    En France, il est répertorié sous plus de 250 noms différents selon les régions.
    L’arbre têtard fait partie de la famille des trognes. La trogne, vient du gaulois “trugna” voulant dire “nez, museau” et désignant un visage grotesque. Il faut dire qu’ils ont vraiment une drôle de tête ces arbres étranges….

    Naissance et vie des arbres à trognes

    Leur allure résulte d’une taille particulière du tronc et des branches principales.
    La plupart des feuillus à pousse rapide peuvent se trogner. Deux exemples sont connus de tous: le cep de vigne qui est l’une des plus anciennes et les fameux platanes qui bordent les avenues ou les routes du sud de la France ! Cependant les arbres qui restent les plus fréquemment trognés sont les saules, les chênes, les peupliers noirs et les frênes.
    Cette taille visait au départ à protéger l’arbre des animaux qui broutaient les jeunes pousses à l’excès au risque de le mettre en péril. Les branches ainsi mises à l’abri des dents gourmandes étaient facilement accessibles pour être utilisées ultérieurement à la demande.
    La création d’une trogne s’effectue sur un arbre jeune. L’écimage du tronc en fin d’hiver va stimuler la pousse des bourgeons dormants sous l’écorce et donner naissance à une couronne de jeunes branches. La cicatrisation des coupes successives va produire des bourrelets dans lesquels de nouveaux bourgeons vont se former. L’écorce prend alors cette forme boursouflée et exubérante si particulière. Au fil des tailles successives, tous les 1 à 15 ans selon les variétés, le tronc s’épaissit sans s’allonger alors que les branches densifient la couronne sommitale. Cette coupe étonnante, qui stimule les défenses de l’arbre en le blessant profondément, accroît paradoxalement sa longévité: un chêne peut vivre jusqu’à 200-300 ans, alors que sa trogne peut atteindre 500 ans!
    Selon la taille, l’essence, l’environnement, l’utilisation, la trogne peut prendre des formes à l’infini. L’arbre dit têtard affiche un gros tronc ventru de 2-3 m surmonté de sa tête couronnée de branches. Lorsqu’il est dit en candélabre, il se dessine en plusieurs têtes et plusieurs bras. Certains horizontaux ! Toutes les combinaisons sont possibles et chaque trogne montre une silhouette unique!

    Un arbre riche de ressources

    Si les trognes ont promené leur plastique tourmentée à travers les siècles jusqu’à notre présent, c’est qu’elles ont offert de multiples richesses et avantages.

    L’expression d’un savoir-faire paysan

    Leur allure ramassée, en limitant la prise au vent, réduisait les risques de déracinement. Ces trognes pouvaient alors se passer de générations en générations transmettant ainsi leurs usages traditionnels. Toutes les ressources naturelles possédaient une vraie valeur dans le monde agricole ancien. Ainsi le propriétaire d’une trogne pouvait instaurer un bail agricole pour l’utilisation des branches, se gardant pour lui-même l’usage éventuel de son tronc!!
    Les taillis aériens étaient utilisés en vannerie, charbon de bois, et fabrication d’objets usuels.
    Les petites branches, nouées en fagots, permettaient l’allumage des poêles, les plus grosses étant destinées aux cheminées ou fours à pain.
    Le frêne était plébiscité pour son utilisation en ébénisterie, fabrication de manches d’outils, de sabots et autres objets du quotidien. Ses feuilles donnaient également un fourrage de qualité pour les animaux domestiques.
    L’orme était valorisé en escaliers, l’alisier en lutherie…
    Les troncs noueux des arbres têtards possédaient une valeur à part et entraient autrefois dans la construction navale fournissant des poutres de belles tailles. Certains étaient même taillés pour émettre des branches charpentières courbes utilisables comme bois de marine pour les coques de bateaux!
    A l’heure actuelle, l’industrie du luxe a jeté son dévolu sur ces spécimens anciens dont le bois au dessin rare se prête si bien à la marqueterie précieuse ou à la création de tableaux de bord en bois pour voiture haut de gamme!

    Un écrin pour la biodiversité

    Même si ce mot est très à la mode actuellement, la biodiversité a toujours été l’amie utile et nécessaire des paysans. Quelles richesses trouvaient-ils au creux de ces arbres parfois gigantesques?
    Sous l’action exacerbée de champignons lignivores, les anfractuosités et cavités creusées au sein du tronc constituent un micro-habitat pour toute une flore opportuniste : mousse, lichens, fougères, lierres, ronces, … Même d’autres variétés d’arbres, comme le frêne ou le sureau, y trouvent le bon substrat pour faire naître leurs jeunes pousses…
    Toute la faune cavernicole en fait aussi un refuge: des mammifères ( écureuils, fouines, martes, lapins, renards,…), des oiseaux ( mésanges, rouge-queues, chouettes, hiboux,..), des amphibiens (grenouilles, salamandres, tritons,…), des reptiles ( couleuvres, vipères, orvets, lézards,…) et de nombreux insectes ( coléoptères, guêpes, abeilles,…) Chacun prenant sa place dans la chaîne alimentaire qui mène jusqu’à l’homme.
    Et à l’intérieur du tronc creux, les matières organiques qui s’y sont déposées sont lentement transformées par des champignons saprophytes, en un terreau particulier appelé “le sang de la trogne” qui était utilisé pour faire lever les semis dans les champs.

    Un patrimoine naturel

    Ces arbres étranges ont été pendant des siècles les composants familiers des haies qui quadrillaient toutes les campagnes françaises. Des lignes d’arbres têtards ont délimité par leurs grandes silhouettes, les chemins, les bordures des fossés, les méandres des ruisseaux et les berges des mares… Mais ils ont parfois aussi joué des rôles beaucoup plus étonnants. Isolés, reconnaissables, ils ont parfois remplacé une borne aux croisées des chemins….des têtards creux ont aussi servi de niches à chiens, de cachettes pour des armes, de supports pour des objets sacrés, croix ou statues, de postes de guets pendant la Grande guerre; certains ayant été remplacés par des fausses trognes blindées à cet effet !!
    Décimé par la destruction des haies, il représente aujourd’hui un élément du patrimoine naturel paysager témoin du savoir-faire de générations de paysans que l’année 2020 a mis en lumière. Une année qui a permis de connaître, réhabiliter, restaurer, planter et valoriser les trognes de nos régions.