Leur pureté, leur transparence, leur forme géométrique, inhabituelles dans le monde minéral, ont depuis des millénaires engendré un émerveillement quasi mystique.
Des pointes de flèches, des silex datant du paléolithique ont été retrouvés taillés dans le cristal de roche, le plus dur de tous les quartz. Sans doute pour une utilisation rituelle.
La découverte en Savoie et dans le Valais, d’objets et outils taillés dans ce même cristal atteste de leur utilisation au cours du mésolithique.
Dès l’Antiquité, le cristal de roche désigne la variété de quartz incolore et transparent provenant des montagnes : il était alors considéré comme de la glace qui ne fondait jamais.
Au cours de la Haute Antiquité, il fait partie des pierres précieuses et est utilisé pour la fabrication de parures et d’objets d’art.
Au Moyen-Âge il sert à la confection de reliquaires précieux et à la Renaissance, dans les cours royales d’Allemagne, de France et d’Italie, les objets en cristal de roche sont des chefs-d’œuvres très prisés, déclinés sous forme de coupes, vases ou hanaps.
Au 17ème siècle on retrouve dans une lettre, une première description de l’activité des cristalliers au cœur de la vallée de Chamonix. Elle parle « d’une glace que l’on peut appeler perpétuelle…Les feux de cinq à six mille canicules, ny les eaux du Déluge universel n’ont pas eu la force de le fondre, si ce n’est en quelques endroits, où l’on trouve souvent du cristal et des pierres précieux. Mais pour dire vray, il est dangereux de les y chercher. Les curieux et les avares y sont souvent accablez en Esté sous la ruine des neiges qui s’éboulent. » C’est aussi à cette époque que l’on découvre un texte relatant les premières techniques de prospection et d’extraction par l’usage des explosifs. Le démarrage en grand de l’activité des cristalliers se développe réellement à partir des années 1650.
Au 18ème siècle la recherche des cristaux bat son plein. C’est une activité d’opportunité, quasi mythique qui va enrôler toute une population désireuse de profiter de cette manne providentielle. Les hommes laissent aux femmes le travail des champs, emmenant avec eux les enfants dans cette chasse au trésor. Les chasseurs traquent le chamois et les cristaux. Ils vendent aux touristes anglais leurs plus belles pièces, en privant ainsi le royaume Sarde qui les réclame pour en faire des lustres et des chandeliers.
Au début du 19ème les cabinets de curiosités sont à la mode, les « savants » expliquent et les grands se passionnent pour le naturalisme : le roi de France va recevoir des mains d’un des premiers guides Michel Paccard , ses plus beaux cristaux et un bouquetin vivant ! Ce commerce naturaliste renforce encore la fouille des moraines du Mont-Blanc. Les guides naturalistes cristalliers, les pauvres, les paysans, tous s’aventurent dans le massif en bravant tous les dangers de la montagne.
Vers 1850, l’intérêt pour les choses naturalistes disparaît progressivement. En 1900, l’activité des cristalliers est devenue quasi inexistante.
La première guerre mondiale met un terme aux collections des minéraux. Mais dans les années 60, les collectionneurs américains se passionnent à nouveau pour les cristaux du Mont-Blanc et relancent ainsi l’activité des cristalliers.
Aujourd’hui ils sont environ une soixantaine déclarés auprès de la mairie à parcourir le massif. Le réchauffement climatique, en faisant reculer les glaciers offre de nouvelles aires de prospection. Les prix à la hausse de ces joyaux montagnards font naître de nouvelles vocations. Des alpinistes, avec de nouvelles techniques de grimpe acrobatique mais purement attirés par l’appât du gain tentent leur chance. Et abandonnent souvent rapidement …
Le mot quartz provient sans doute d’un mot en vieil allemand « quaderz » qui signifie « mauvais minerai ».
Les cristaux de quartz sont composés de silice, (formule chimique SiO2) l’élément minéral le plus représenté sur terre. Les mouvements tectoniques à l’origine de la chaîne alpine ont généré des tensions dans les roches qui se sont fissurées par endroits. Ces fentes et fractures sont datées de 18 à 20 Ma. Le granite est altéré et poreux. Les circulations hydrothermales qui y siègent vont dissoudre la silice de la roche. Dans des conditions de température (entre 573 et 1470 °C) et de pression adéquates, cet élément en saturation va cristalliser et former des quartz. L’ensemble de la fente ou de la géode que l’on appelle un four va alors se tapisser de cristaux.
Les fentes alpines et fours de ce massif granitique fournissent de très beaux spécimen principalement de quartz fumés et de fluorites rose.
Les quartz sont des cristaux trapus et très purs. Ils peuvent prendre toutes les teintes allant de la transparence absolue (quartz hyalin ou cristal de roche) jusqu’au noir profond (quartz morion). Entre les deux on trouve tous les quartz fumés. Leur teinte, qui varie du brun au noir, est due à l’irradiation naturelle du granite environnant sur leurs impuretés d’aluminium.
Les cristaux de fluorite, très rares, sont de forme octaédrique et de couleur rose à rouge.
Une large variété de formes et de tailles existe. Classiquement c’est un prisme hexagonal, plus ou moins large, plus ou moins long, terminé en pointe. Mais on trouve dans le massif le très rare quartz vrillé dit gwindel qui est plat avec un axe en hélice.
Les cristaux sont parfois assemblés en groupe : on parle de macle. Leur orientation les uns par rapport aux autres est régie par des lois définies complexes et propres à chaque gisement.
A la fin des années 60, l’activité de collecte de cristaux du Mont-Blanc est relancée pour répondre à la demande pressante des collectionneurs américains. Ce sont les guides de haute montagne qui les premiers se remettent à explorer les fissures du massif.
Jeunes et moins jeunes, descendants de longues lignées de cristalliers ou néophytes passionnés, ils ont tous en commun l’amour de la montagne et les capacités techniques pour escalader les parois rocheuses à la recherche des fours à cristaux.
De cette passion qui les anime, aucun d’entre eux n’en vit réellement.
Pour beaucoup, cristalliers depuis de très longues années, déjà enfant trottant derrière leurs pères, c’est une espèce de chasse au trésor qu’ils poursuivent inlassablement. Construite comme une véritable enquête. Du repérage aux jumelles de signes indiquant la présence d’un four dans les parois, aux escalades de plus en plus acrobatiques et engagées pour explorer des endroits vierges de toute recherche. La fonte du permafrost et le recul des glaciers qui dévoilent de nouvelles zones à fouiller, attirent chaque saison de nouveaux prospecteurs. Mais le réchauffement climatique favorise chutes de pierres et éboulements et les accidents mortels ne sont pas rares. C’est une passion d’engagement sur le long terme qui chaque année laisse sur le bord de la route les moins motivés et les moins chanceux.
Ils sont une soixantaine à s’être déclarés auprès de la mairie. Obligation qui leur confère le droit d’aller fouiller les roches du Mont-Blanc dont le sol et sous-sol appartiennent à la commune de Chamonix.
Depuis 1996, pour protéger et préserver cet environnement montagnard, une circulaire ministérielle a interdit l’utilisation des explosifs pour sortir les cristaux de leur gangue de pierre. Seuls outils autorisés : le burin et la masse…
De son côté, en 2008, la mairie de Chamonix a pris un arrêté établissant un code d’honneur des cristalliers : en fin de saison de prospection, le 15 décembre, ces derniers doivent présenter les cristaux qu’ils ont extraits et lui donner la priorité en cas de vente pour éviter leur départ dans des collections privées et conserver ainsi ce patrimoine.
Certains minéraux d’exception, comme les fluorines et les quartz gwindel , très rares voient leurs prix s’envoler. Un marché parallèle, destiné aux collectionneurs et non déclaré semble exister. La quête du joyau d’exception est dans tous les esprits et fait naître des envies auprès des nouveaux chercheurs s’improvisant cristalliers. Mais il ne suffit pas d’être bon alpiniste et la méconnaissance du massif, son immensité et ses difficultés font que ces derniers abandonnent rapidement.
Il ne restera au final que les véritables passionnés …
Bibliographie : Une courte histoire des cristalliers du Massif par Eric Asselborn.
ADRESSE
623 route des grands vignobles
74320 Sevrier
TEL / MAIL
+33685642198
contact@la-yaute.fr
FORMULAIRE
nous
contacter
Copyright © 2022 – La Yaute | Réalisation : www.andre-veyrat.fr | Mentions Légales. | CGU | Cookies